Un risque inexactement déclaré n’est pas ou mal assuré

Maud Asselain, maître de conférencesArticle rédigé par Maud Asselain, Maître de conférences, Directrice de l’Institut des Assurances de Bordeaux (IAB) pour Alteas, courtier en assurances sur Bordeaux & Paris.

Sous peine de sanctions qui peuvent aller jusqu’à la nullité du contrat, le candidat à l’assurance est tenu de déclarer exactement les risques dont il souhaite transférer la charge sur l’assureur.

I. – Description de l’obligation pesant sur l’assuré

1. Initiative de la déclaration. Il appartient à l’assureur de prendre l’initiative de se renseigner sur l’importance du risque qu’on lui propose de couvrir et donc de questionner le candidat à l’assurance, afin de se forger une opinion du risque. L’article L. 113-2, 2°, du Code des assurances n’enjoint à l’assuré que « de répondre exactement aux questions posées par l’assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l’assureur l’interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l’assureur les risques qu’il prend en charge ». 

Si l’assureur s’abstient de questionner son futur partenaire contractuel, il ne pourra ensuite reprocher au souscripteur d’avoir passé sous silence l’existence d’une circonstance, quand bien même celle-ci était susceptible d’influer sur l’appréciation du risque couvert.

2. – Formes de la déclaration. Un arrêt de la Chambre mixte de la Cour de cassation du 7 février 2014 a très clairement condamné la pratique des déclarations pré-imprimées (ou pré-remplies). L’assureur est tenu d’interroger le candidat à l’assurance, lequel doit répondre lui-même aux questions posées (Cass. ch. mixte, 7 févr. 2014, n°12-85107). L’assureur ne peut se prévaloir des sanctions attachées à l’inexactitude que s’il est en mesure de prouver qu’il a effectivement questionné (par écrit ou oralement) le souscripteur lors de la conclusion de la police et que les réponses de ce dernier sont contraires à la vérité.

En conséquence, il est exclu que l’assureur puisse se contenter de produire un formulaire standardisé de déclaration, pré-rédigé par les services de la compagnie et au bas duquel le futur assuré s’est borné à apposer sa signature. 

II. – Sanction de la violation de l’obligation

3. – Lorsqu’une question est posée au candidat à l’assurance sur la configuration du risque qu’il propose à l’assureur de garantir, il doit y répondre avec exactitude, un mensonge, voire une simple omission, l’expose, sous certaines conditions (1°), à la résiliation ou à l’annulation du contrat (2°).

1° Conditions de la sanction

4. – Influence de l’inexactitude sur l’opinion de l’assureur. L’inexactitude de la déclaration faite par le futur assuré n’appelle de sanction que dans la mesure où elle a eu une influence sur l’opinion que l’assureur s’est faite du risque. L’article L. 113-8, comme, implicitement, l’article L. 113-9 du Code des assurances, subordonne la sanction qu’il édicte à l’existence d’une « réticence » ou d’une « fausse déclaration » qui « change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur ». En d’autres termes, il est nécessaire que le jugement de l’assureur ait été faussé, de telle sorte que, s’il avait été exactement informé, il aurait renoncé à contracter ou ne l’aurait fait que moyennant une prime plus élevée.

Lorsque cette condition est remplie, il importe peu que « risque omis ou dénaturé par l’assuré ait été sans influence sur le sinistre ».

6. – Conditions de preuve. C’est sur les épaules de l’assureur que pèse la charge de la preuve de l’inexactitude et de son incidence sur l’opinion qu’il s’est faite du risque. Cette preuve peut être faite par tous moyens (enquête, expertises, aveu de l’assuré) de nature à établir que la réponse apportée par l’assuré ne correspond pas à la réalité. Le cas échéant, il appartient également à l’assureur, conformément au droit commun qui présume la bonne foi, de démontrer le caractère intentionnel de la fausse déclaration ou de la réticence dont s’est rendu coupable le candidat à l’assurance.

2° Nature de la sanction

8. – Sanction de la fausse déclaration intentionnelle du risque. Lorsque l’assuré a sciemment effectué une fausse déclaration du risque soumis à l’assurance dans l’intention de tromper l’assureur, le contrat d’assurance est frappé de nullité par application de l’article L. 113-8 du Code des assurances. En conséquence, le sinistre à l’occasion duquel la fraude de l’assuré a été découverte ne sera pas couvert. Au-delà, l’assuré doit rembourser à l’assureur l’intégralité des indemnités qu’il a perçues en exécution du contrat annulé. En revanche, par dérogation au principe des restitutions réciproques qu’entraîne normalement l’annulation, l’assureur est en droit de conserver les primes payées et d’obtenir paiement des primes échues et non encore réglées, à titre de dommages et intérêts.

9. – Sanction de l’inexactitude de bonne foi de la déclaration. L’assuré est de bonne foi lorsqu’il a commis une erreur involontaire dans sa déclaration du risque. 

L’inexactitude de la déclaration n’entraîne pas la nullité. Elle a néanmoins une incidence sur le contenu, voire sur le sort, du contrat et, le cas échéant, sur le montant des indemnités de sinistres dues par l’assureur.

En application de l’article L. 113-9 du Code des assurances, l’assureur dispose d’une option. Il peut décider, en premier lieu, de maintenir le contrat moyennant une augmentation de prime acceptée par l’assuré. Il peut au contraire procéder à la résiliation du contrat, ce qu’il fera si, exactement informé de la configuration du risque, il n’aurait pas accepté de le garantir initialement. Dans le cas où l’assureur opte pour la résiliation, celle-ci ne prend effet qu’au terme d’un délai de dix jours suivant sa notification à l’assuré par lettre recommandée. L’assureur doit en outre restituer la portion de prime « payée pour le temps où l’assurance ne court plus », c’est-à-dire la fraction de prime correspondant à la période séparant la résiliation de la date d’échéance de la prime suivante.

Lorsque l’inexactitude est découverte à l’occasion d’un sinistre, l’assureur est en droit de procéder à une réduction de l’indemnité en proportion du rapport existant entre la prime payée par l’assuré et celle dont il aurait dû s’acquitter si le risque avait été exactement déclaré. En application de cette « réduction proportionnelle de primes », l’assuré qui, par exemple, a versé une prime équivalente au tiers de celle qui aurait dû être à sa charge, verra l’indemnité de sinistre réduite des deux tiers. 

Etant donné la gravité des sanctions encourues, on ne saurait que vivement recommander au futur assuré de faire preuve de sincérité et de vigilance lorsqu’il remplit son questionnaire de déclaration du risque.

Sources :

https://www.village-justice.com/articles/fausse-declaration-dans-les-contrats-assurances,35960.html

https://www.capital.fr/votre-argent/fausse-declaration-assurance-1380551

https://www.dalloz-actualite.fr/flash/declaration-du-risque-conditions-de-nullite-pour-fausse-declaration-intentionnelle#.YNmj6dUzapo

Photo : Pixabay

Un article signé, Maud Asselain, Maître de conférences en Droit privé, Directrice de l’Institut des Assurances de Bordeaux pour Alteas.

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